Le tournage et le montage vidéo
1 - INTRODUCTION
Le travail sur une production vidéo comporte deux phases : le tournage et le montage. Il s'agit d'abord d'acquérir, avec une caméra, les images et les sons qui vont servir de matériaux de base dans votre produit final (par exemple, dans le cas d'un documentaire, filmer les interviews, les illustrations...). Puis la totalité de ces éléments (les rushes) va s'enchaîner - normalement avec harmonie - selon un ordre bien précis et déterminé. Ils se verront ensuite adjoindre la musique, une ou des voix-off... Mixer tous ses éléments constitue la phase de montage. Si l'étape du tournage n'a pas beaucoup changé au fil du temps, le montage a lui beaucoup évolué depuis quelques années, changement dû essentiellement aux nouvelles technologies. La méthode traditionnelle, consiste à partir de plusieurs magnétoscope source (players), de mélanger les signaux, d'y ajouter quelques effets et titres pour enfin copier le tout sur un autre magnétoscope enregistreur (recorder). Tout cela s'exécute en restant tout au long de la chaîne de production en analogique, ce qui autorise alors jusqu'à 5 générations sans pertes de qualités notoires (pour le Betacam SP).
Vers la fin des années 1980, la société AVID® a développé le premier "Media Composer", système de montage, dit non linéaire (aussi appelé montage virtuel). Il autorise une numérisation du signal vidéo source et son stockage dans les disques durs d'un ordinateur pour parvenir au montage des séquences. Il s'agit là d'une lecture aléatoire des données sur les disques, les têtes de lecture allant chercher les rushes sur toute leur surface. Cette méthode offre un confort de travail accrû appréciable comparé à la méthode traditionnelle dite de multimachine. Cependant, l'élaboration d'un tel système entraîne avec lui plusieurs problèmes : en fait, le flux vidéo devant, pour des raisons de débit et de stockage, être compressé, cela provoque une perte de qualité, bien souvent reprochée par les défenseurs du montage multimachine traditionnel. Ce qui était vrai, il y a encore environ cinq ans est bien sûr déjà dépassé : la norme actuelle, (une compression de 2:1 et un échantillonnages en 4:2:2) s'avère suffisante pour une qualité broadcast (pouvant prétendre à la diffusion TV).
Mais il existe aujourd'hui des systèmes de montage non linéaires et non compressés. Le montage virtuel a quelque peu bouleversé les habitudes de travail, puisqu'il demande à être divisé en deux sessions dites off-line et on-line. En off-line, le travail s'effectue en basse résolution (pour des raisons d'économie d'espace disque), puis quand le projet a été validé, l'étape consiste à passer en conformation ou en session on-line, et ce sur une station offrant une résolution optimale pour sortir sur bande un produit fini de qualité. Il s'agit du master, ou encore "PAD" (Prêt à Diffuser) dans le cas d'une diffusion TV.
2 - TOURNAGE
Le travail sur une production vidéo comporte deux phases : le tournage et le montage. Il s'agit d'abord d'acquérir, avec une caméra, les images et les sons qui vont servir de matériaux de base dans votre produit final.
3 - MONTAGE
3.1 - Dérushage
Le tournage s'étant bien déroulé, l'ensemble des plans attend simplement d'être mis dans le bon ordre. Seulement voilà, bien souvent, le montage ne s'effectue pas dans la foulée... la difficulté consiste alors à se rappeler de tout ce qui a été filmé ! C'est pour cela qu'avant toute chose, prévoyez un peu de temps pour répertorier vos séquences. Cela prend certes du temps, mais l'investissement s'avère bien rapidement payant puisque le montage n'en sera qu'accéléré. Première chose, pensez à indexer les différentes cassettes, vous numérisez ainsi les séquences par lots, mais aussi conformerez sans souci. Evitez toutefois les noms trop compliqués et optez pour des abréviations dont vous vous rappellerez les significations. Sur la feuille de dérushage, devront figurer les informations suivantes :
3.2 - Temps de montage
Attention aux désillusions : à titre d'infos, un monteur pro ne monte qu'entre 2 et 3 minutes par jour... N'espérez donc pas monter votre film en quelques heures. De plus, pour faire un bon film, il faut une diversité de rushes qui se traduit au niveau quantitatif. Généralement, le rapport se situe entre 5:1 et 20:1 (Durée de rushes : Durée du film). Pour être plus clair avec 5 minutes de film au minimum et 20 minutes au maximum, vous ferez 1 minute de film au final.
3.3 - Numérisation des séquences
Avant de commencer à monter, il faut procéder à la numérisation des différents rushes. Il existe deux façons de procéder :
- La première consiste à digitaliser les séquences les unes après les autres, en déclenchant le début de la digitalisation à la volée, et la stoppant à la volée. C'est certes rapide mais très imprécis.
- La deuxième méthode consiste à déterminer les points de début et de fin de chaque séquence à digitaliser puis de lancer la digitalisation. Cela implique que votre ordinateur puisse piloter votre caméscope ou magnétoscope pour se caler aux images désirées. Renseignez-vous sur votre matériel pour savoir s'il possède une interface (Firewire/IEEE1394, RS-422 etc...) Une fois tous les clips référencés (mais pas encore digitalisés) vous pouvez lancer un "Batch Digitize" (Numérisation par lots) qui donnera l'ordre à l'ordinateur de numériser toutes les séquences les unes après les autres.
3.4 - Organisation des rushes
Une fois les séquences digitalisées, il s'agit pour vous de les classer par thèmes, types, etc... Pour cela, les logiciels de montage vous permettent de créer des chutiers (Bins en anglais) qui sont des sortes de dossier dans lesquels vous classerez vos médias. Par exemple, si vous avez toute une séquence se déroulant à la plage, créez un chutier "plage" dans lequel vous disposerez les médias correspondants. Vous pouvez aussi créer un chutier "musique" où vous placerez toutes les musiques de votre film, etc... Le but est de faciliter au maximum l'accès aux séquences. A l'intérieur d'un chutier, une séquence peut-être représentée de plusieurs façons : soit par un icône représentant une image clé de la séquence, soit par du texte (son nom, par exemple).
3.5 - Off-Line & On-Line
Lorsque les premiers systèmes de montage virtuel ont fait leur apparition, il était alors impossible d'espérer obtenir un espace disque équivalant à 10 heures de rushes. C'est pour cette raison qu'une notion totalement nouvelle a été introduite : celle de Off-line & On-line. L'idée est d'effectuer tout le montage en travaillant avec des médias numérisés en basse résolution, permettant un gain de place considérable. Une fois le montage effectué, seuls les médias utilisés dans le montage seront re-digitalisés en haute résolution. D'importants projets qui nécessiteraient 100 voire 200 Go d'espace disque peuvent se voir ainsi finalisés sur un espace réduit de 18 voire 36 Go (car lors de la conformation on-line, les médias inutiles sont éliminés).
3.6 - Le montage
Les clips numérisés et stockés dans les chutiers se voient ensuite placés dans la Timeline, soit directement (drag'n drop) soit par l'intermédiaire d'une fenêtre. Commencez par définir le point d'entrée et de sortie du plan (ce qui va être utilisé). Placez le clip dans la timeline (sachant que rien n'est figé et que vous pourrez y revenir dessus plus tard). Dans le cas où le raccord deviendrait impossible, utilisez un plan intermédiaire ou "plan de coupe". Prenons le cas d'une interview où l'on souhaite ne retenir que 3 plans. Il y aura nécessairement 2 raccords à masquer car sinon, le personnage interviewé semblera "sauter" d'un plan à un autre.
Pensez donc au tournage à ces plans de coupe (plans des mains, plan sur un objet en rapport avec ce que dit la personne interviewée, etc...) Le plus propre est souvent de filmer la personne avec plusieurs valeurs de cadre différentes (un plan serré sur le visage, un plan poitrine, plan américain, etc...) Dans ce cas, l'enchaînement de plans ayant des valeurs de cadre différentes ne provoquera pas de faux raccords. Si rien n'y fait et que malgré toutes ces astuces le faux raccord subsiste, vous avez un dernier recours dans les effets (C'est ce qui est le plus souvent utilisé dans les reportages news). Effectuez un fondu rapide de 2 à 3 images entre les deux plans, un flash au blanc ou noir, un volet, etc... Mais bon... c'est de loin la moins jolie et la moins professionnelle.
Rappelez-vous bien qu'obtenir un bon raccord n'est pas chose facile. Il arrive parfois de passer plusieurs minutes sur un raccord. La règle d'or est de toujours garder du recul sur son travail. Vous pouvez trouver qu'un raccord est mauvais en le regardant image par image mais ne plus rien voir en le visionnant en dynamique. N'hésitez pas à visionner votre raccord en dynamique avant de chercher la perfection. De plus, ne visionner pas que les 2 secondes encadrant le raccord mais pensez à revenir une vingtaine de seconde avant le raccord pour voir la cohérence du rythme de votre montage.
Enfin, je ne pourrais pas vous donner de recette miracle pour effectuer un bon montage tant elles sont nombreuses et variables selon les cas. Je m'efforcerai donc de vous donner une petite liste des principales choses qui me viennent à l'esprit :
Chaque plan monté ne l'est pas par hasard. Il doit servir à la narration ou à la résolution de problèmes d'ordre technique. Un bon trucage est un trucage qui ne se voit pas !
Evitez "l'effet pour l'effet". N'utilisez les effets que lorsque ceux-ci sont nécessaires (Je conçois que c'est dur étant donné la panoplie existante dans votre logiciel de montage...). Prenez conscience que le "CUT" est le raccord roi.
Ne méprisez jamais le son au profit de l'image.
Pensez au rythme de votre montage. Force est de constater qu'au fil du temps, le rythme du montage va en augmentant. Dans les années 70 ou 80, il était fréquent de trouver des plans de 30 secondes. C'est aujourd'hui très rare. Désormais, les nouvelles techniques permettant de monter à l'image près, il est monnaie courante de trouver des plans de moins d'une seconde. Certains vous diront que c'est mieux, moins soporifique, mais là encore, il n'y a pas de règle. Simplement, si vous rognez d'un côté, il faut compenser de l'autre... Je veux dire par-là qu'un plan de 30 secondes peut être rythmé à une seule condition : qu'il s'y passe quelque chose d'intéressant.
Donner un sens à vos plans (Effet Koulechov). La juxtaposition de deux images par le montage crée un sens qui n'est pas intrinsèque à l'une ou l'autre des images de départ. C'est un russe, du nom de Koulechov qui montra qu'un même visage pnger d'expression lorsqu'on lui faisait succéder des plans montrant des sujets divers : un bifteck, un enfant. Une expression identique semblait alors exprimer la gourmandise, puis la tendresse.
Amusez-vous aux raccords. N'enchaînez jamais deux plans par hasard : amusez-vous à effectuer des raccords de mouvement, de position, dans l'axe, etc...
Le raccord de position est un raccord spatial. Le but est de maintenir l'oeil à un même endroit de l'écran malgré le changement de plan. Par exemple, enchaînez le plan d'un visage situé au centre de l'écran avec un autre plan dont l'élément principal se situe au même endroit de l'écran.
Pensez à splitter... Pour dynamiser une interview, pensez à amener le son de l'interview. On appelle ça le Split. L'effet inverse, en revanche, marche très rarement (amener l'image avant le son)
Champ-contre champ. Si vous vous voulez instaurer un dialogue entre deux personnages, ne faites jamais regarder ces personnages dans la même direction (même s'ils ne sont jamais à l'écran en même temps) Dans ce cas, c'est le regard du personnage qui fera votre raccord. De même, vous pouvez jouer sur les regards pour effectuer vos enchaînements.
Entrées et sorties de champ. Un objet qui sort du champ d'un côté de l'écran ne rentre que rarement du même côté. Evitez de faire sortir un personnage à droite de l'écran pour le faire entrer du même côté dans le plan suivant. Faites-le entrer dans le champ par le côté inverse pour ne pas rompre la continuité du mouvement.
N'hésitez pas à couper dans un mouvement. Dans la plupart des cas, il n'est pas nécessaire de voir tout un mouvement pour arriver à ses fins. Vous pouvez couper certaines phases du mouvement pour gagner en rythme. D'une manière générale, il n'est pas nécessaire de montrer toute une action. Procédez à des ellipses temporelles. Exemple : si vous voulez mettre en scène un personnage entrant dans une pièce, vous pouvez montrer ce personnage peu de temps avant, lorsqu'il se dirige vers la pièce puis enchaîner avec un plan ou il referme la porte derrière lui.
Profitez de l'action et des erreurs. Utilisez l'action pour vos raccords. Si au tournage, par exemple, une personne maladroite est passé devant votre objectif, utilisez le voile noire qu'elle a causé comme un volet. De manière générale, sachez détourner toutes les erreurs et imperfections à vos profits.
Transgressez les règles. Comme je le disais un peu plus haut, il n'y a pas de règles établies pour le montage d'un film. N'hésitez pas à passer outre les "on dit", "on fait", "on doit" et sortez des sentiers battus. Exercez-vous aux faux raccords, aux contre-sens, etc... cela ne pourra donner que du style à votre oeuvre. Attention pourtant, tout l'art sera ici de faire comprendre au spectateur qu'il s'agissait d'un acte volontaire de votre part et non d'une erreur.
3.7 - Titrages et corrections
Tous les logiciels génèrent maintenant des titrages de bonne qualité, vous pouvez même y ajouter mouvements et effets. Une application directe : réalisez génériques de début et de fin, et titrages (indications de lieu, des noms...). Veillez à respecter la limite déterminée par la zone de sécurité des titres. Des éléments graphiques peuvent même être incorporés (logos, dessin...) en les convertissant dans un format exploitable par le logiciel de montage. Attention à la qualité de l'incrustation, car tous les logiciels de montage n'opèrent pas forcément en fonction d'une couche Alpha (signal de transparence). Certaines de leurs modifications éventuelles peuvent être apportées comme des corrections colorimétriques. Les programmes incorporent tous des effets de ce type plus ou mois performants ; toutefois cela relève plus du trucage que du montage.
3.8 - Mixage et postsynchronisation
Le projet en place se termine bientôt. La dernière étape consiste à le mixer c'est-à-dire à agir sur les niveaux audio des différentes séquences de manière à obtenir un tout normalisé (0 dB) et cohérent. Ne négligez pas l'impact des sons par rapport à l'image : ainsi il se révèle parfois nécessaire d'isoler certaines sources et de les mettre en avant pour éviter la confusion. Par exemple, un plan avec une personne tapant à la machine dans un appartement peut signifier plusieurs choses selon le point de focalisation : l'action même (renforcer le bruit de machine à écrire) ou le décor (renforcer les ambiances extérieures). Or la prise de son réalisée ne permet pas toujours d'isoler une source définie. C'est pour cette raison que l'on fait appel aux CD de bruitage, dont il existe de nombreuses collections. Il suffit de synchroniser l'effet sonore à l'action en se basant sur l'image : c'est la phase de la post-synchronisation.
3.9 - Sortie
Le projet complété, vous devez conformer (dans le cas où le travail s'effectuerait en basse résolution) et calculer les effets. Procédez alors à la sortie sur bande : les informations binaires stockées sur les disques durs sont lues dans un ordre déterminé par le montage (d'où le nom de montage non linéaire ou virtuel) et converties ensuite en un signal vidéo, stockable sur une bande magnétique.
Un conseil de pro : ajoutez sur les premières minutes de la bande une mire de barre et un signal sinusoïdal de 1000 Hz pour le calibrage du tout.
3.10 - Le montage chez soi
Vous ne devez donc plus louer une régie de montage pour produire un film de qualité. En effet, le format DV permet une bonne imagerie numérique à faible coût. De plus, les systèmes de montage non linéaires performants deviennent accessibles et permettent la numérisation des séquences DV par le Firewire. Prévoyez une unité centrale suffisamment rapide pour gérer une carte et un programme d'acquisition DV ; une carte d'acquisition Firewire/IEEE1394, des disques durs supportant un débit deux fois supérieures à celui du DV (3,6 Mo/s). Préférez les disques IDE en ATA66 ou 100 minimum, aussi performants et moins chers que les SCSI, un magnétoscope DV équipé de Firewire/IEEE1394 (entrée et sortie). N'utilisez pas un caméscope, le mécanisme, n'étant pas aussi robuste que celui d'un magnétoscope de montage, un moniteur vidéo : bien que beaucoup de logiciels de montage permettent la visualisation d'une image vidéo sur écran d'ordinateur, s'y fier uniquement reste périlleux (colorimétrie et Gamma différents...) un logiciel de montage gérant le format DV : très performants pour un coût relativement dérisoire (moins de 1000 Euros), ils rivalisent pour certains avec les solutions de montage les plus performantes.
3.11 - Rappel des types de montage
LE MONTAGE CUT :
Il assemble des images bout à bout. C'est le montage le plus rapide.
Il est utilisé pour le montage des sujets du journal. Inconvénient : une modification
dans le montage est très longue à corriger.
Ce montage utilise deux magnétoscopes (un lecteur et un enregistreur) connectés
à une table de montage (ou mélangeur).
LE MONTAGE VIRTUEL :
Les éléments sont stockés sur les disques durs de l'ordinateur et assemblés par un logiciel de montage.
Ce procédé est beaucoup plus long car un lourd travail de numérisation est nécessaire.
Par contre, toute modification est très facile à prendre en compte.
Il est utilisé pour les magazines et également pour les génériques et l'habillage.
Informations de diverses sources dont Arnaud AUGST. Traduction et adaptation : Stef
Cet article fait en parti référence au logiciel PREMIERE® (qui est un logiciel de montage professionnel) de la société ADOBE Systems, inc.®